2024

L'année s'achève, les flocons tombent, le vin disparaît peu à peu de la bouteille. Je veille jusqu'au lendemain, je veille à être témoin de cette année qui s'achève. 2024, je le sens bien, pour une fois. J'aime sa sonorité, sa mélodie, son rythme. J'aime sa simplicité symétrique, dans son ensemble, c'est une année de chiffres pairs et logiques, une année de chiffres que j'aime bien, qui m'apaisent. Je fais le bilan, je me sens libre. Je me sens libre comme le vent qui court dans les vallées, libre comme les vagues qui filent vers le rivage. Je me sens libre comme mes pieds qui plongent nus sur la terre humide et forestière, libre comme les feuilles que je rencontre en haut des arbres. Je me sens pousser des ailes, courir sur les collines, escalader les montagnes, sauter d'arbre en arbre. Les nouveaux départs ne sont qu'un prétexte, un prétexte pour vivre à nouveau. La vie prend son sens quand le sens n'est plus la quête et que vivre le devient. Je n'ai pas besoin de fuir si je suis nomade. Je n'ai pas besoin d'avoir peur d'essayer si essayer c'est oser vivre. J'ai oublié ce mot : OSER. Pourtant, il a été le mot phare lors de mon arrivée. J'ai oublié d'oser, j'ai eu peur de souffrir, j'ai eu peur de me perdre, j'ai eu peur de vivre. Je suis libre, je me sens libre, je me sens vivre. Je ne veux pas rentrer dans les cases, je ne veux plus me satisfaire des normes. Je serai ma seule norme ; mon cœur, mes désirs et mes envies au profit de la raison seront ma seule régie.
 
Hélyo James, 31 décembre 2023

LES HURLEMENTS

Ma tête hurle et ses hurlements m'empêchent de dormir. À force de les faire taire, ils hurlent. Mes sentiments bien sûr, tout est toujours question de sentiments. J'avais mal au cœur, tellement mal au cœur ; tout le temps, sans arrêt. À présent, j'ai mal au crâne. J'ai fait taire mon cœur alors mon crâne hurle. Il hurle de le réanimer, de ne pas laisser mon cœur mourir. C'est paradoxal, j'ai l'impression qu'il meure chaque fois que je l'écoute battre. La pression intracranienne est immense, immensément douloureuse. J'ai la nausée et mes yeux sortent de leur orbite. Les hurlements résonnent partout dans mon corps, ils paralysent mon repos et martyrisent mes os de leur vibration incessante. Mes muscles ne se reposent jamais, ils souffrent de se contracter. J'ai si mal que j'en perds la vue, littéralement, ma vision se trouble. J'ai si mal que je vais m'effondrer, mon crâne va se fracasser contre le sol de porcelaine, la pression va se libérer dans un jaillissement de sang. Je ne peux pas ignorer les faits, ils sont flagrants, ils sont constants. C'est pour ça que je fuis : pour ne pas affronter ces maux qui me hurlent dessus. C'est pour ça que j'oublie : je suis épuisé d'aimer. Je n'ai plus de cachets dans mon armoire pour atténuer les hurlements de mon crâne. De toute façon, il n'existe qu'un seul remède à cette fatigue éternelle : le paradoxe. Tout est toujours paradoxal. Je me meurs d'aimer alors je dois aimer. Et si je ne veux pas aimer de cet amour unE autre que moi ? Tant pis, ça ne suffit pas. Les hurlements résonnent seulement lorsqu'il y a une chose qu'il m'est impossible d'admettre, seulement lorsque je refuse un non-sens inné. Mon crâne hurle parce-que j'ai décidé d'abandonner ; il hurle parce-que, capricieux qu'il est, il ne peut accepter ma solitude innée. Mon crâne hurle parce-que j'ai refusé la répétition d'un scénario qui m'a déjà blessé, qui m'a trop de fois brisé. Alors quoi ? Je suis damné à souffrir quoiqu'il en soit ? Franchement, c'est d'un ridicule ! Je suis éreinté. Taisez-vous et laissez-moi dormir en paix. Mes yeux vont exploser, ma tête va fondre sous la pression accumulée. Les lettres de mon clavier tremblent déjà. Je mélange les mots, je ne suis plus capable de lire, je ne suis plus capable d'écrire, je ne peux plus dormir, j'ai la sensation de mourir.
 
Hélyo James, 27 décembre 2023

LES DOMINOS

Le soleil brillait de mille feux, lorsque le matin je regardais par ma fenêtre. Sa respiration dans mon cou me soufflait que tout allait bien, que la journée s'annonçait belle. Nos baisers me révélaient la simplicité complexe des relations humaines et l'amour éternel de deux amants-aimants. L'air frais matinal réchauffait mon âme jusqu'à la soirée. Les nuages abreuvaient mes feuilles du temps, de temps en temps. Tout était beau, tout était si beau. Et puis... je suis tombé, j'ai trébuché. J'ai trébuché sur mes éternelles et sempiternelles questions. J'ai perdu la vue, j'ai perdu l'ouïe. J'ai perdu le temps, j'ai perdu mon cœur. Et puisque j'attire l'improbable, j'ai même perdu la vie. J'ai perdu la vie si parfaite, même imparfaite, dans laquelle je naviguais. Je ne sens plus de souffle dans mon cou, je ne sens plus de mains dans mon dos. Je ne vois plus de toit, je n'entends plus sa voix. Je ne vois plus ma terre, ma terre d'accueil, ma terre de cœur, je suis forcé de retourner sur la mer. Comme une partie de dominos géants, la tour au complet s'est écroulée. Je ne suis même plus dans le droit, je n'ai même plus de droits. À présent je crains d'être chassé hors de ma terre de cœur, loin de mon cœur. Je n'ai jamais de répit, j'en suis interdit. Et si demain je meurs, je serai interdit de demeure : parole du gouverneur. Je resterai éternel dormeur, prisonnier de mon malheur, loin de ma terre de cœur, ma tant chère terre de cœur.
 
Hélyo James, 22 décembre 2023

MAL DE CŒUR

J'ai mal au cœur, je n'ai plus de cœur. Il ne bat plus, il est mort. Mes larmes sont devenues des rivières silencieuses, des torrents muets. Je me sens vide. J'ai si mal, si mal que je n'ai plus de souffle. Je ne respire plus, je suis mort noyé. Je suis seul dans la nuit, marchant dans un monde où tout est cendres. Mon monde entier a pris feu, mon monde entier s'est embrasé et ma flamme s'est éteinte. Je ne vis plus, je flotte dans une lourdeur fantomatique. Chaque cellule de mon corps a cessé de vivre, a cessé de s'expandre et s'est fripée jusqu'à disparaître complètement. Je n'ai plus de corps, il flotte au loin dans l'océan Atlantique, perdu au milieu de nulle part. Mes poumons n'ont plus d'air, je les sens mourir à chaque souffle qui les effleure. Ma poitrine s'enfonce toujours plus, à l'infini, elle se fossilise. Je n'ai plus la force. Je ne mange plus, je n'ai plus d'estomac, plus d'intestins pour digérer.
 
Hélyo James, 21 décembre 2023

DÉLIRE IMAGÉ

Je regarde mon image, accrochée sur le frigo, je ne me reconnais plus. Je ne suis pas si merveilleux qu'il le pense. Je suis laid, tellement laid que c'en est affligeant. J'ai un cœur de pierre pur, un cœur aussi bon qu'il est noirci par la toxine qui l'anime. [...] Je ne suis pas celui que l'on voit sur la photo, je ne suis plus personne. Je suis fatigué de ne pouvoir aimer, je suis fatigué de ne pouvoir mourir. C'est une bataille continue que je mène incessamment dans mes songes. C'est une guerre que jamais je ne pourrai gagner. Je ne suis plus là, je ne suis plus devant toi, je ne suis plus nulle part. Je suis tellement, tellement laid. Je ne raisonne plus, je ne résonne plus, je ne rayonne plus. Coquille emplie de l'invisible, telle la perle silencieuse de l'huître. Deux visages gravés sur les deux faces de la pièce. L'ange rayonnant au soleil, le démon hurlant à la lune. Ma peau est brûlée jusqu'aux cendres, mon âme est fantomatique. Je suis un monstre, un monstre qui erre dans un labyrinthe de sentiments oubliés. Je pensais cet état la conséquence de ce tout, de toute évidence il en est la cause. Le reste n'est que subterfuges, illusions, allusions ; le reste ne sert qu'à masquer l'horreur réelle et soudaine que je suis devenu. Tu vois, tu ne peux pas m'aimer. Je ne suis qu'une psychose, un simple délire. 
 
Hélyo James, 2 décembre 2023

L'OXYDATION DU SOMMEIL

La douce acidité sucrée pétille sur mes lèvres dans l'infinie nuit qui défile. Le voile s'est tendrement déposé sur mon esprit tourmenté. Le rouge vif coule dans mes veines et hurle au diable de se libérer. Hurle, hurle si fort que chaque atome de cet univers s'en trouve entièrement et radicalement transformé. Hurle, hurle dans mes oreilles jusqu'à la plus totale et définitive des surdités. Annihile tout espoir d'entendre à nouveau, annihile tout, simplement, et purge de mon crime qui n'est que perspective. C'est si simple pourtant, si simple que c'en est ridicule. Ça pétille, ça bouillonne et... criss je succombe. Apprends moi, là, tout de suite... à dormir ? Trop de sucre circule dans mon sang pour que je plonge dans les rêves. L'acide gèle mon cerveau jusqu'à la moelle. Je ne suis pas maître de mon corps et je veux être maire. Ça pétille -trop- fort autour de l'écrou qui retient le fil, il oxyde. L'oxydation remonte dans mes veines et embrasse mon sommeil qui de fait ne vient pas. 
 
Hélyo James, 30 novembre 2023

LES CENDRES

Les cendres tombent du ciel, il est déjà trop tard. Elles tombent innocemment, impunément, humbles jusqu'à leur finalité : écrasées sur le bitume blanc. Le monde est déchu, vaincu par ce que nous appelons humainEs. Le monde s'est battu, preuve en est ces dernières et fébriles cendres. Le feu ravage le monde, le feu a déjà ravagé le monde. Nous sommes pauvres témoins de cette échec flagrant : nous, que les autres accusent. Les cendres puisent dans leur restant de force pour ensemble assommer leur assassinEs. Absurde fatalité. 
 
Hélyo James, 30 novembre 2023

LES MOTS

Je n'ai plus de mots. J'ai perdu mes mots. Pour une fois, je n'ai réellement plus de mots. Je pensais que l'alphabet entier était gravé quelque part dans ma chair, je me trompais. Les lettres ne s'encrent plus. J'ai perdu la langue, j'ai perdu mon cristal qui me permettait de voir si clair. J'ai perdu la clarté, j'ai perdu la vue. Je suis sourd et aveugle. Un vieux monsieur à peine moustachu qui a déjà survécu à la démence, non pas une, non pas deux, non pas trois, mais plus de fois que je ne peux m'en assurer. J'ai survécu à la démence mais la lucidité m'a achevé. La lucidité a succionné l'encre hors de mes vaisseaux sanguins, elle a arraché ma chair entière et dilapidé l'alphabet. Au complet. Je n'ai plus de lettres pour former mes mots. Je n'ai plus non plus de bras. Je suis manchot, en plus d'être sourd et aveugle. Je suis manchot et mes bras sont fantomatiques. Ils n'effleurent plus que l'âme de celleux qu'ils enlacent. Je n'ai même plus de jambes. Je n'ai même plus de jambes pour courir sur les sentiers gelés. En fin de compte, voilà pourquoi je n'ai plus de mots : je n'ai simplement plus de corps ! Je n'ai tout simplement plus de corps. Plus de peau à caresser, plus de chair à embrasser. Je n'ai plus de corps. Voilà mon comble : je n'ai plus de corps, je n'ai plus de mots. 
 
Hélyo James, 27 novembre 2023

ANARCHIE ASSOURDIE

Quel drôle de trait humain ! Tourner le volume au maximum pour faire taire les évidents problèmes qui ne demandent que résolution, rugissant avec toujours plus de hargne, de plus en plus fort. Je tourne le volume de mes écouteurs de plus en plus fort et ce n'est pas à cause de ma légère surdité génétique qui accroît au fil des mois. J'essaie de faire taire les pensées envahissantes, les pensées qui creusent mon cœur pour le vider de sa terre fertile et la déplacer côté psychose. Je ne veux plus les entendre, pas là, pas maintenant, pas ce soir, pas en sa présence. J'essaie là de protéger cette relation que j'aime tant, cet être que j'aime tant, car dès lors que tout sortira, les deux prendront cher. Cette force autodestructrice est puissante, tellement puissante qu'elle entame mon instinct reptilien de préservation. Alors je tourne la musique de plus en plus fort, jusqu'à m'ôter chaque seconde des millionièmes de décibels d'audition, jusqu'à ce que mon corps soit envahi de ce rythme endiablé, de ces instruments déchaînés, de ces voix enragées. Ça me fait du bien, le hard rock et le metal apaisent mon âme meurtrie. Ces styles musicaux que j'affectionne tant m'ont accompagné dans chacune de mes psychoses et ont guéri mes songes les plus anarchiques et destructrices. L'anarchie, ça ne fonctionne qu'à moitié chez moi. Et ce soir, mes pensées sont anarchiquement synchronisées avec mes émotions, plus aucune règle n'est de mise sans rationalité
 
Hélyo James, 21 octobre 2023

DISSONANCE

Les voitures entrent en collision avec mon champ visuel dans une brutale douceur. Le temps est brutal au ralenti. Le bus fonce lentement et droit sur moi. Je ne peux le voir, je suis trop lent, je suis déphasé. Je suis arrivé chez nous avant même de réaliser que j'étais en marche. J'ai failli tuer un cycliste en étant sourd de sa sonnette et aveugle de son ombre. Pendant 40min, j'ai marché, entrevu des mirages, suis passé à deux doigts de me prendre un énième panneau de signalisation dans le visage... mon visage... j'ai mal au visage, j'ai mal à la tête. Pendant 40min j'ai écrit sans me rendre compte que j'écrivais. Sans porter attention au soleil qui brûlait mes rétines et aux gens qui apparaissaient puis disparaissaient de ma bulle. Voilà une belle dissonance. 
 
Hélyo James, 28 septembre 2023

CONFÉRENCE

À la renverse. La framboise bat si fort qu'elle en échappe son coulis dans mes veines à en chatouiller mes poumons. Chaque petit muscle de son fruit se contracte l'un après l'autre et pompe le rouge écarlate hors de sa cage bombée. Le coulis coule jusqu'à terre et se répand dans la pièce jusqu'à l'inonder complètement. Il coule jusqu'à ses pieds, jusqu'à sa bulle, son petit monde enseveli sous la neige. Autour le monde s'écroule, devient chaos dans le noir. À la renverse. Mes veines se purgent de ce jus sucré. Dans le noir, les formes abondent et se dandinent dans tous les sens. Seule une demeure inerte : la sienne. Inerte jusqu'à ce que ses yeux, qui jusque-là étaient plongés dans le vide, entament une lente rotation de 32° vers l'Est depuis le 58ème degré Nord. Ils poursuivent leur rotation jusqu'à tomber sur la seule autre forme inerte dans cette pièce si noire : la mienne.
 
Hélyo James, 27 septembre 2023

BALANCIER MIROIR

L'air se fend devant moi telle une lame aiguisée transperce la chair de celle qui aura trop parlé, de celle qui aura trop osé. Les jambes se balancent dans un mouvement interminable, sans fin. Je regarde le métronome éternel du temps qui passe et de la vie qui s'achève. Elles rebondissent sur le trottoir à la manière de ressorts dansants et se font tracter de cette force qui ne peut qu'aller en avant, ce même lorsqu'elles semblent être à reculons. Le métronome m'hypnotise, me voilà grimpant les marches de l'envers. À l'envers tout est plus fluide, tout est plus calme. Cet univers bidimensionnel ramène à l'essentiel, à ses ombres qui disparaissent à petit feu. Elles désertent la terre pour plonger dans la cascade du ciel. Là-bas le temps n'est plus et la vie non plus. Je ne suis qu'une forme divaguant sur la carte du monde. D'ici, la terre n'est pas ronde. Peut-être que ces âmes qui déchirent leur voile ne voient plus que ce monde, peut-être ne sont-elles pas complotistes, seulement perdues. Quoiqu'il en soit, le métronome que j'observe dans ces vitres en marchant va bientôt disparaître, je vais faire face à Laurent. Je vais prendre forme dans cet autre univers, tridimensionnel, et ne plus qu'imager ces ombres intérieures. Un pas sur le pont et... je ne vois plus le temps. Un dernier regard sur les chaussures de ma voisine et ses lacets sont libres ; seuls ses lacets sont libres.
 
Hélyo James, 12 septembre 2023

LA GLACE DU TEMPS

Le temps qui coule a figé de sa glace les brouillards de bonheur et les épars malheurs. Ni moi ni la Terre en chaleur n'avons le pouvoir de faire fondre cette glace souveraine qui brime le voile spacio-temporel. La glace cristallise mes rêves futiles et les rêves futurs ne peuvent que fuir de plus belle vers une terre plus fertile, plus sage et réfléchie. Que de rêves cristallins je laisse sur mes pas, au fil des années qui passent ! Le cristal de ces rêves nourrit ceux d'aujourd'hui, ceux de demain et ceux inconscients. Quand le temps aura glacé même mes derniers rêves terrestres alors, tel un oisillon perdu au-dessus de l'océan, lorsque les battements d'ailes ne suffiront plus à me garder en vie, je plongerai dans l'eau et me changerai en poisson. Ainsi, je rêverai d'amour et d'eau fraîche à nouveau. En attendant, si l'on se fie aux prévisions terrestres et aux statistiques humaines, me voilà passé le quart de chemin, dans l'année qui se veut l'addition de mes racines.
 
Hélyo James, 16 juillet 2023

ÉPISODE

Un pied dans l'eau et me voilà emporté par les torrents ensanglantés de la guerre, me voilà passager des courants éphémères, aspiré par la mer et foudroyé par l'éclair. Ne peut s'échapper que le plus fou des sages, la folie du plus sage qui le sauve de ces mirages et le prive des ravages. À quoi bon lutter quand la chute est inévitable ? La guerre n'est éternelle que par son caractère épisodique, par ses failles caractéristiques. L'ancrage qu'elle prend sur nos vies dépasse outrageusement celui de notre uchronie. Je suis passager du train fantôme, si rapide, imperceptible jusqu'à désir, il me traîne loin du limpide, jusqu'à la grotte de la satire.
 
Hélyo James, 5 février 2023

INSOMNIE

Elle guette la nuit et me ronge le jour, maligne torture de mes songes. Paupières lourdes et insatiable désir de rêves, le plafond infini fait mon ciel. Mon corps tourmenté bouge sans relâche sur le banc de soie vide. Mes yeux dévorés par le sang fixent ce ciel blanc sans trêve, ma tête vide ne trouve pas sommeil. Des courants me traversent et me tiennent en haleine, du soir au matin, du matin jusqu'au soir. Je ne dors pas, je veille. Elle vole mes nuits comme elle vole ma vie, l'insomnie, ce démon de minuit.
 
Hélyo James, 15 janvier 2023

PYROMANIE

La lune veille, le soleil fond sur la neige. J'observe le rituel des lumières. Et je plonge. Je plonge dans l'étincelle de cette flamme qui m'ensorcelle. Cette flamme qui brûle si fort qu'elle en illumine le néant alentour. Je vois. Je vois pour la première fois. Je vois, je te vois. J'ai peur de cet instant où le temps cessera pour de bon, de quand le néant aura consumé cette flamme qui pétille de mille feux. Je ne rêve que d'une chose : que la flamme le consume avant lui, que les étincelles enflamment la toile noire, la toile si sombre qu'aucune autre lumière ne la transperce. J'ai peur que la flamme s'éteigne aussi vite qu'elle est apparue dans nos cœurs. Et si ma toile n'était pas celle de ton pinceau ? Et si ton pinceau trouvait plus belle toile ailleurs ? Et si les brins de mon pinceau noircissaient ta flamme d'un malheur monstre ? Je veux cirer ses poils pour qu'ils fassent resplendir ta flamme, pour que jamais elle ne meure. J'ai si peur du feu, mais je l'aime tant, le feu. Et toi, toi que je vois, Ô que je brûle pour toi. Mon cœur saigne de ce feu qui m'embrase. Mon cœur peine de cette peur qui m'assaille. [...] Le rituel des lumières se poursuit et je l'observe ahuri. Ô que je l'aime.
 
Hélyo James, 4 janvier 2023